Siège SNCB

Avis de Midi Moins Une ! sur la demande de permis du siège SNCB

Vous trouverez ci-dessous l’avis de Midi Moins Une ! rendu dans le cadre de l’enquête publique sur la demande de permis d’urbanisme pour le projet du nouveau siège de la SNCB à l’avenue Fonsny 47b à 49.


Si vous désirez réagir dans le cadre de cette enquête publique et demander à être entendu par la Commission de concertation

  • envoyez un e-mail à la Commune de St-Gilles
  • ou écrivez au Collège des Bourgmestre et Echevins, place M. Van Meenen 39, 1060 Bruxelles

N’hésitez pas à vous inspirer de l’avis ci-dessous. La date limite de l’enquête publique est le 14 décembre 2021.


1. Philosophie générale de construction du nouveau siège de la SNCB

La demande de permis d’urbanisme (PU) présentée à l’enquête publique résulte de la décision de la SNCB (et de HR Rail) de regrouper ses bureaux à l’avenue Fonsny 47b à 49 dans une opération d’échanges de terrains avec un consortium de promoteurs immobiliers. Dans cette opération, le consortium immobilier rénove et surélève d’une nouvel construction les bâtiments des 47b à 49 avenue Fonsny pour y installer l’ensemble des bureaux et équipements du nouveau siège social de la SNCB et HR Rail. Cette phase constitue l’actuelle demande de permis.

En échange de la réalisation de ce nouveau siège, la SNCB cédera au consortium immobilier, d’une part, une partie du bâtiment à l’avenue Fonsny 49 en vue d’une rénovation en hôtel (qui a déjà fait l’objet d’une demande de PU passée à l’enquête publique en février-mars 2021) et, d’autre part, ses autres implantations du quartier (sites « Bara », « Delta » rues Bara et de France et « Atrium » rue de Russie) libérées par l’opération de regroupement du siège. Ces trois sites feront dès lors l’objet d’un redéveloppement complet mais au contour encore indéfini par le consortium immobilier. D’après le projet de PAD récemment passé à l’enquête publique, les intentions de ces redéveloppements semblent vouer ces sites à la démolition complète pour y ériger divers programmes comprenant logements, hôtelerie et équipements.

Notons déjà que, pour juger de la pertinence en terme de bon aménagement des lieux de la présente demande de permis, il convient donc de garder en perspective les impacts de l’ensemble de l’opération immobilière dont ce permis n’est qu’une étape.

On remarquera que ce projet répond plus particulièrement à une volonté d’optimisation immobilière liée à des opportunités de marché (« (…) une convergence exceptionnelle d’initiatives et de financements. », site nmbssncbfonsny.be consulté le 01.12.2021) qu’à une nécessité absolue liée à l’organisation du travail : par exemple, HR Rail et/ou le centre de formation pourraient très bien occuper des immeubles différents que ceux abritant les bureaux administratifs de la SNCB. Aujourd’hui, les outils numériques et la téléphonie rendent caduque une organisation du travail nécessitant la présence conjointe dans un même lieu de tous les travailleurs d’une entreprise de cette nature et de cette taille. D’un point de vue pratique et de rationalité organisationnelle, on imagine mal qu’un employé situé au 9éme étage du bâtiment aille 150 m plus loin, 4 étages plus bas pour échanger avec un collègue plutôt que de lui téléphoner, envoyer un e-mail ou utiliser un outil de visioconférence. À cet égard, la période de télétravail imposée par la pandémie de Covid-19 a montré que la SNCB a pu travailler avec la quasi totalité de ses travailleurs administratifs en télétravail complet pendant plus d’un an et demi. Beaucoup d’entreprises de cette taille fonctionnent parfaitement dans une morphologie de « campus » ou en occupant plusieurs bâtiments.

2. Gabarits et hauteurs

2.1. Interprétation du Règlement Régional d’Urbanisme sur les hauteurs

La présente demande de permis contient une importante dérogation au Règlement Régional d’Urbanisme (RRU) concernant sa hauteur. Suivant l’analyse du demandeur (voir Note explicative, p.94-96), cette demande est soumise à l’art. 8 de la Section 2 du Chapitre II, Titre 1 du RRU relatif aux constructions isolées. D’après cette analyse, la hauteur de construction permise par le RRU serait de 50,69 m. Notons que cette valeur est tirée vers le haut par l’inclusion de la Tour du Midi dans le calcul (hauteur 151,36 m).

Relevons d’abord que, si on se réfère au tableau de calcul présenté en p. 96 de la Note explicative, le calcul effectué semble incorrect au regard du §1 de l’art.8, Section 2 du RRU qui indique que « La hauteur des constructions ne dépasse pas, la moyenne des hauteurs des constructions sises sur les terrains qui entourent le terrain considéré (…) ». Or, une moyenne – à ne pas confondre avec une médiane – doit se calculer en additionnant les hauteurs de chaque construction en proportion de la part de longueur du terrain qu’elle occupe de l’ensemble des longueurs de terrains à prendre en compte.
Par exemple, si il faut calculer la hauteur moyenne de deux bâtiments de 10 m et 20 m de haut, cette moyenne dépendra de la proportion de largeur de façade que chacun occupe sur l’ensemble. Si le bâtiment de 10 m de haut occupe une largeur de 40 m et que celui de 20 m de haut occupe également une largeur de 40 m, le calcul est le suivant :

10 x (40 : 80) + 20 x (40 : 80) = 15 m de hauteur moyenne

Si l’immeuble de 10 m de haut occupe 60 m de largeur et celui de 20 m de haut a 20 m de large, le calcul devient :

10 x (60 : 80) + 20 x (20 : 80) = 12,5 m de hauteur moyenne

Or, dans le calcul effectué p.86 de la Note explicative, il est d’abord fait un calcul de la hauteur moyenne par îlot avant de faire une moyenne de ces hauteurs… indépendamment de la largeur de chaque îlot. Ceci a pour effet d’annuler le calcul sur l’ensemble comme indiqué dans le §1 de l’art.8, Section 2 du RRU et de maximaliser la proportion prise en compte dans le calcul des îlots les moins larges (en particulier, îlot 7 – Tour du Midi : hauteur retenue 151,36 m) par rapport aux îlots les plus larges (en particulier, îlot 8 : hauteur retenue 43,03 m), comme si ces îlots avaient la même largeur.
On notera aussi que, dans ce calcul des moyennes, le demandeur ne prend en compte que le « point haut » de certains îlots/constructions. C’est notamment le cas de l’îlot 7 dont n’est pris en compte que la hauteur de la Tour du Midi mais pas des parties basses de son socle. C’est aussi le cas des îlots 2, 3, 4 et 8. Cette prise en compte partielle des hauteurs tire à la hausse le calcul des hauteurs à prendre en compte alors que les immeubles qui composent ces faces d’îlots comportent aussi des hauteurs plus basses à front de rue. Cette manière de procéder ne correspond pas aux prescriptions du RRU qui indique de prendre en compte « la moyenne des hauteurs des constructions sises sur les terrains qui entourent le terrain considéré » et pas la moyenne de la hauteur maximale des constructions. Ceci est d’autant plus vrai pour l’îlot 2, dont seule une partie minoritaire de l’ensemble constitue le « point haut ».

En plus des considérations ci-dessus, la prise en compte de l’îlot 7 comprenant la Tour du Midi, nous semble contestable. En effet, le §1 de l’art.8, Section 2 du RRU indique que « La hauteur des constructions ne dépasse pas, la moyenne des hauteurs des constructions sises sur les terrains qui entourent le terrain considéré, (…) ». Or, l’îlot 7 est situé de l’autre côté des voies de chemin de fer et éloigné et décentré par rapport au terrain objet de la demande de PU. Peut-on vraiment le considérer comme « entourant » le terrain considéré ? À cette aune, il faudrait alors aussi prendre en compte la partie d’îlot situé entre le chemin de fer, la rue de France et la rue des Vétérinaires (site « Delta » et immeubles voisins rue de France). Et, surtout, le bâtiment/îlot du « grand quadrilatère » (face à la gare, rue couverte et avenue Fonsny) et la partie de la Gare du Midi directement attenante au projet devrait être pris en compte dans le calcul. Le « grand quadrilatère » et la gare du Midi se trouvent sous les voies ferrées mais n’en constituent pas moins des « constructions ». Ces constructions, contrairement à la Tour du Midi, « entourent » le projet et en sont plus proches. Le fait que ces bâtiments possèdent des entrées et sorties, sont couverts et abritent (ou abritaient) des fonctions diverses (autres que simples supports aux voies ferrées) en atteste suffisamment.

Enfin, nous nous demandons si la présente demande relève bien de la Section 2 du Chapitre II du RRU (relative aux « constructions isolées ») et pas, plutôt, de la Section 1 (relative aux « constructions en mitoyenneté »). En effet, considérer que les immeubles aux 47 à 49 forment un îlot à eux seuls nous paraît abusif. À notre analyse, ces immeubles sont compris dans un îlot plus large délimité par les voiries au sol, à savoir, l’avenue Fonsny, la rue couverte, la rue Blérot, la place Horta, la rue de France et la rue des Vétérinaires (en partie sous pont de voies ferrées). L’îlot au sens du RRU est un « ensemble de terrains, bâtis ou non, délimité par des voies de communication à l’air libre ou par des limites naturelles ». Or, les voies de chemin de fer qui surplombent certaines parties de l’îlot ne délimitent pas ces constructions, elles sont simplement construites à une hauteur de rez ou rez+1 au dessus de certaines constructions. Ce qui délimite l’îlot sont les voiries au sol. Il est d’ailleurs possible d’entrer dans la gare par les rues sous les voies de chemin de fer ou de passer librement d’un côté à l’autre sous ces voies de chemin de fer, par les voiries publiques au sol (rue couverte, tunnel/pont rue des Vétérinaires). Par contre, il n’est pas possible de pénétrer dans l’îlot à l’air libre, l’ensemble du pourtour de l’îlot étant construit, y compris au Sud du 49 à l’avenue Fonsny ; des murs fermant l’îlot. Comme cet îlot est constitué de constructions mitoyennes de propriétaires différents (SNCB, Infrabel), il est bien constitué de constructions en mitoyenneté.

La surélévation des bâtiments demandée dans le cadre de ce permis étant un élément essentiel de cette demande et impliquant les plus fortes incidences sur les environs, il est impératif d’évaluer correctement quelle est la dérogation en hauteur au RRU demandée. De plus, afin d’émettre un avis et des recommandations pertinentes sur ce qui serait acceptable pour un éventuel permis amendé, la bonne connaissance de la hauteur admissible par le RRU est une donnée essentielle.

Nous pensons donc que :

  • il y a lieu d’évaluer correctement si la demande relève de la Section 1 ou de la Section 2 du Chapitre II du RRU et
  • au cas où cette demande relève effectivement de la Section 2, de revoir le calcul de la moyenne des hauteurs des îlots voisins en prenant en compte les remarques posées ci-dessus. Vu l’importance de cette donnée dans l’évaluation globale du projet, nous considérons que toute divergence avec la présente demande doit impliquer une nouvelle enquête publique.

2.2. Impact sur les vues, perspectives et ombres

Le nouveau bloc prévu en surplomb de l’ensemble historique existant aura un impact considérable sur les vues du quartier. Les immeubles existants ont déjà une présence visuelle imposante et sont en rupture avec les gabarits du quartier avoisinant composé de maisons mitoyennes en rez+3 étages. Les immeubles à l’avenue Fonsny 47 à 49 s’échelonnent actuellement sur des hauteurs de ± 30 à 38 m de hauts. La surélévation prévue dans le projet fait monter cette hauteur de manière uniforme à 60,5 m, sur une longueur de 236 m.

Cette surélévation est placée en retrait de ± 9 m des constructions existantes. Pourtant, cela n’empêchera pas de la rendre bien visible depuis le trottoir Est de l’avenue Fonsny, accentuant l’effet canyon créé par la constructions des immeubles de bureaux face à la gare dans les années 1990. La perception de ce retrait disparaît par ailleurs dès qu’on s’éloigne dans les rues latérales à l’avenue Fonsny où cette surélévation devient très visible et bouche fortement les vues vers le ciel. C’est particulièrement le cas dans les perspectives des rues de Hollande et de Suède. L’impact sera moindre mais non négligeable dans les perpectives des rues Rossini et de l’Instruction à Anderlecht.

La surélévation aura aussi un impact, non étudié dans l’Etude d’Incidences sur l’Environnement (EIE), sur les vues depuis les étages des habitations des rues du quartier, en particulier, depuis les rues de Mérode et Féron et de l’av. de la Porte de Hal, mais aussi des rues de Russie, d’Angleterre, Joseph Claes, Coenraets et depuis les logements sociaux autour du square Jacques Franck, dont certains appartements sont mono-orientés dans la direction de l’Ouest, vers la Gare du Midi.

Rappelons que le quartier Midi est l’un des plus dense de Bruxelles et souffre d’un déficit d’espaces verts et d’espaces publics ouverts (cfr. diagnostic préalable à l’élaboration du CQD Midi), que les habitants sont logés en appartements et, pour beaucoup, ne bénéficient pas d’espaces extérieurs privatifs. Dès lors, les seuls espaces dégagés extérieurs qui restent sont les vues vers le ciel et l’horizon. La disparition d’une partie non négligeable des vues vers le coucher de soleil et l’ombre portée par le bâtiment aux dernières heures de la journée en sera d’autant plus dommageable pour les riverains. On s’étonne d’ailleurs que la situation des ombres portées en soirée n’est pas étudiée par l’EI (voir p.309 et suivantes), dont les simulations des ombres sont présentées seulement pour la période du jour entre 9h et 15h. C’est un manquement d’autant plus choquant que ce sont aux heures du levé et, surtout, du couché du soleil que les habitants et rues voisines seront les plus impactées par les ombres engendrées par la nouvelle construction.

Dans un environnement urbain aussi dense, le sentiment d’écrasement dû à l’ajout d’une construction haute amplifiera d’autant plus le sentiment d’enfermement et de manque d’espace que peuvent ressentir les habitants en sortant dans leurs rues. La perspective de voir le ciel (le dernier espace ouvert) encombré par un mastodonte est donc inacceptable aux yeux de beaucoup.

Enfin, il ne faut pas négliger l’impact important du projet depuis des perspectives et vues plus éloignées. L’immeuble surhaussé sera visible à partir de nombreux points, que ce soit depuis l’espace public ou les habitations (Porte de Hal, boulevard de Waterloo, avenue de Stalingrad, boulevard Lemonnier, rue du Mont-Blanc, rue de Birmingham…).

3. Mobilité

La situation de saturation automobile de l’av. Fonsny est déjà notoire alors que les bâtiments des 47 à 49 sont actuellement pratiquement inoccupés. Le simple fait de les occuper et, en plus, d’y adjoindre un supplément de plus de 30.000 m2, risque fort d’avoir des incidences notables sur la circulation locale. On peut s’attendre dès lors à voir une partie de cette circulation chercher des échappatoires à l’avenue Fonsny en se répandant d’avantage dans les rues habitées alentours (rues de Mérode, Féron et perpendiculaires) en y créant encore plus de nuisances, alors que la situation y est déjà dégradée. À cet égard, nous regrettons que l’EIE n’étudie pas les effets cumulatifs des projets en cours de développement non loin de là, en particulier autour du bassin de Biestebroeck.

Le risque d’encombrement de la circulation sur l’av. Fonsny ne sera pas tant le fait de la création du parking voitures du siège, limité à ± 40 places, que, d’une part, la présence d’un parking/quai de déchargement pour la logistique et, d’autre part, la configuration de l’entrée du parking voitures, le tout, éventuellement combiné à la reconfiguration future de l’avenue Fonsny (remise du site propre tram à double sens contre la façade Ouest de l’avenue).

Vu les vastes superficies de bureau et services prévus, on peut s’attendre à un besoin important de logistique et, dès lors, à un trafic accru de divers véhicules de livraisons et services divers (enlèvement des déchets, nettoyage…). Ces véhicules devront entrer et sortir du bâtiment directement sur l’avenue Fonsny. Rappelons que, en venant du Sud de l’avenue Fonsny, il est impossible d’y faire demi-tour pour rejoindre le côté Ouest (à cause du tram en site protégé). La seule option pour les véhicules venant du Sud est donc de pénétrer dans les quartiers résidentiels plus à l’Est par la rue de Mérode principalement pour, au bout de celle-ci, y rejoindre les rues de Suède (pour le parking voitures) ou de Russie (pour le parking logistique ou voiture) et, ainsi, passer du côté Ouest de l’av. Fonsny. Ce sont donc les rues de Mérode et de Russie qui subiront une bonne partie du trafic logistique de camions et autres véhicules utilitaires, alors qu’elles souffrent déjà d’une circulation trop dense, en contradiction avec le plan Good Move.

Pour ce qui est de l’entrée parking voitures, il est prévu que son accès se fasse via un ascenseur à voitures. Or, ce système implique que les véhicules puissent se retrouver en position d’attente relativement longue pour entrer dans le parking, au risque de bloquer la circulation sur l’avenue Fonsny et/ou d’encombrer et bloquer le trottoir et la piste cyclable.

Enfin, la demande ne tient pas compte de l’intention de la Région de revoir la configuration de l’avenue Fonsny en y déplaçant le site propre des voies de tram le long de la façade Ouest de l’avenue. Cette configuration aurait pour conséquence que toute entrée/sortie des deux parkings doive croiser les rails du tram. Cette situation serait accidentogène, augmenterait d’autant les difficultés d’entrée/sortie de ces parkings et risquerait d’affecter significativement la circulation des trams.

4. Patrimoine

L’intention générale du projet est de préserver et remettre en valeur le patrimoine constitué par l’ensemble des immeubles historiques construits en 1949-1958 par les architectes Adrien et Yvan Blomme et Fernand Petit à front de l’avenue Fonsny. Nous nous félicitons et soutenons cette approche. Toutefois, la surélévation de ces bâtiments mettent en partie à mal ce patrimoine.

D’une part, les nécessités techniques de la surhausse amène à introduire une série de structures au travers des bâtiments historiques pour soutenir la partie en surhausse. Ces nouvelles structures perturberont les espaces et les structures existantes. On notera, par ailleurs, que les façades arrières des 47 à 49 seront démolies, ainsi que de nombreux éléments internes dont il est difficile d’évaluer la valeur faute d’un inventaire extensif.

D’autre part, la surhausse des bâtiments, malgré le retrait, brouillera la perception de l’articulation variée des hauteurs et de la composition des bâtiments historiques dès qu’on prend un peu de recul.

Vu la taille, la présence iconique dans le paysage bruxellois ainsi que l’intérêt architectural, typologique et historique des bâtiments existants, et vu l’impact important du projet sur ce bâti, nous demandons à ce que l’avis de la Commission Royale des Monuments et Sites (CRMS) soit demandé et pris en compte dans l’évaluation de la demande de permis ou comme recommandations pour un permis amendé en ce qui concerne l’intervention sur le patrimoine.

5. Impact sur la faune

La présence des grandes surfaces vitrées de la surélévation qui, côté quai, se déploie de manière continue sur une grande façade d’environ 50 x 236 m, inquiète quant au risque d’y voir un grand nombre d’oiseaux la percuter. L’EIE (p.437 et suivantes) se borne à considérer que le type de vitrage et l’application de sérigraphie devraient limiter le risque de collision d’oiseaux. Cette analyse nous semble un peu légère car il n’est pas analysé clairement les espèces d’oiseaux concernés, qu’ils soient présents en permanence ou de passage lors de migrations. Cette étude, qui doit être qualitative (quels espèces et quand) et quantitative (comptage selon période de l’année) est d’autant plus nécessaire que la perception des surfaces et réflections varie selon les espèces et que les mesures de diminution du risque varient en conséquence.

6. Réduction des consommations énergétiques et des rejets de gaz à effets de serre

Le projet se présente comme « écologique » et économe en ressources (voir p.73 de la Note explicative) et se targue de sa certification BREEAM « Excellent ».

Toutefois, cette évaluation se centre sur le bâtiment et ne prend pas en compte le projet global soutenant cette demande de permis. Rappelons que la réalisation de ce projet de regroupement des bureaux de la SNCB s’accompagne de l’abandon d’un certain nombre d’autres bâtiments cédés au consortium immobilier en échange de la réalisation de ce nouveau siège. Sans que l’on ne connaisse encore exactement le détail des redéveloppements prévus, il est annoncé que ceux-ci prendront la forme de démolitions des anciens bâtiments occupés par la SNCB pour y construire diverses nouvelles constructions (cfr. projet de PAD Midi récemment passé à l’enquête publique). Certains des bâtiments cédés par la SNCB ont été construits il y a à peine 30 ans, voire moins : immeubles Atrium (2000), ceux à front de la rue Bara (1991), bâtiment à front de la rue des Vétérinaires/angle rue de France (1996). Les nombreuses opérations de démolitions-reconstructions lourdes et énergivores (création de déchets, charroi de camions…) qui découleront de ces opérations impliqueront un gaspillage de ressources en totale contradiction avec toute ambition de réduction de l’emprunte écologique et d’impact sur le climat.

Par rapport au scénario d’une simple rénovation sans surélévation des bâtiments avenue Fonsny et la continuation de l’occupation d’un autre site existant par la SNCB (formulée par une « alternative 0+ » de l’EIE), la présente opération de regroupement avec surhaussement équivaudra à une opération de démolition-reconstruction de la partie surhaussé de l’immeuble, ceci pour une surface de planchers de l’ordre de 31.000 m2.

Il paraît raisonnable dans le contexte actuel de politiques visant à réduire les émissions de gaz à effets de serre, d’éviter le gaspillage du bâti existant (d’autant plus qu’il est relativement récent) et d’éviter une opération qui induit plus de démolitions-reconstructions que nécessaire en favorisant une alternative plus sobre (cf. infra, point 8).

7. Intégration des surfaces de l’ensemble du bâtiment à l’avenue Fonsny 49

Les surfaces de bureau projetées pour le nouveau siège de la SNCB sont de près de 62.971 m2, plus 8.904 m2 d’équipement et 364 m2 de commerce, soit 72.239 m2, alors que les bâtiments actuels n’offrent qu’une superficie de plancher totale de 41.528 m2. Le déficit de surfaces à combler via la surhausse du bâtiments est donc de 30.711 m2. Or, plutôt qu’une surhausse de cette ampleur, ce déficit pourrait déjà être partiellement comblé par l’adjonction au projet de l’ensemble du bâtiment à l’avenue Fonsny 49. Cet immeuble de bureau du 49 a fait l’objet d’une demande de PU, toujours à l’instruction, pour en faire un hôtel. L’avis de la Commune de Saint-Gilles lors de la Commission de concertation de mars 2021, rejoignant les remarques que nous avions nous-même émises, préconisaient déjà d’intégrer les 8.412 m2 de ce bâtiment pour les adjoindre au siège de la SNCB et réduire ainsi le déficit de surface désiré par la SNCB sans surhausse de 30.711 m2 à 22.299 m2 (disponibilité de 50.432 m2 au lieu de 41.528 m2).

L’intégration de cet immeuble au projet aurait d’autant plus d’intérêt que le marché hôtelier dans la zone est plutôt déprimé (par exemple, le récemment construit Meininger Hotel voisin offre, dans un segment similaire, des chambres à prix cassés partant, certains jours, de 22 €/nuit), que cette intégration permettra une gestion à terme cohérente du patrimoine (entretien des façades), n’empêche pas une activation du rez-de-chaussée si on la juge pertinente, ne constitue pas une perte de mixité vu la présence, de l’autre côté de la rue, d’un front bâti de logements et de quelques commerces et que cette ensemble appartient aujourd’hui déjà entièrement à la SNCB. Le fait que les demandeurs du permis soient éventuellement différents ne change rien à cette situation.

8. Alternatives au projet

Le présent projet de siège de la SNCB et les partis-pris du programme général et du deal entre la SNCB et le consortium immobilier a été élaboré et est annoncé depuis un certain temps. Les éléments principaux en sont :

  • le regroupement de l’ensemble des bureaux de la SNCB et HR Rail en un seul bâtiment à front de l’avenue Fonsny, avec surélévation importante des immeubles historiques existants ;
  • et la cession au consortium, en échange de la construction du nouveau siège av. Fonsny, des autres terrains occupés actuellement par la SNCB dans le quartier en vue d’un redéveloppement futur par le consortium ;
  • et la cession par la SNCB au consortium d’une partie de l’immeuble à l’avenue Fonsny 49 pour y faire un hôtel.

Si on peut comprendre la volonté de la SNCB de rationaliser son implantation dans le quartier (actuellement répartis sur une dizaine de bâtiments), le projet actuel n’est pas pour autant la seule, ni la meilleure solution possible. Le projet soumis à la demande de permis a pour principal défaut d’être spéculatif. Spéculatif car il spécule sur la possibilité d’obtenir une dérogation importante au RRU sur les hauteurs admissibles. Or, c’est la perspective d’une telle densité et des hauteurs qu’elle implique qui engendre les incidences négatives dénoncée plus haut et les oppositions qui en découlent. Parce que ce projet engendre de telles nuisances et qu’il est spéculatif, il doit être logiquement refusé.

Toutefois, il semble aussi évident qu’un projet alternatif qui évite une densification trop importante et une surélévation des immeubles à l’avenue Fonsny 47 à 49 et, donc, les incidences négatives qui l’accompagne, est tout à fait envisageable, tout en répondant raisonnablement aux objectifs de rationalisation de l’implantation de la SNCB et HR Rail dans le quartier.

Pour nous, le principe fondamental à suivre est celui de la rénovation respectueuse du patrimoine à l’avenue Fonsny 47 à 49 pour y regrouper la majeur partie des bureaux et services que souhaite y regrouper la SNCB mais sans surélévation des bâtiments actuels. Comme la SNCB ne pourra pas y loger l’ensemble des services qu’elle envisage d’y loger dans la demande actuelle, elle devra occuper un deuxième site.

Ce type de scénario est celui proposé par l’ « alternative 0+ » de l’EIE (p.84 et suivantes). Toutefois, des variations de ce scénario sont possibles et il est dommage qu’ils n’aient pas été explorés dans l’EIE. Par exemple, la SNCB pourrait occuper l’ensemble des bâtiments historiques et emblématiques de l’avenue Fonsny 47 à 49, y compris la partie du 49 qui lui appartient mais est actuellement hors permis (projet d’hôtel). Cette occupation de l’ensemble des 47 à 49 correspond à une surface disponible de 50.432 m2. Par rapport au projet d’occupation de la demande actuelle (72.239 m2), cela créé un déficit de surface de l’ordre de 22.500 à 23.000 m2 (en considérant que l’occupation d’un deuxième site accroisse quelque peu les besoins en surface dédiés aux services et à la logistique du deuxième site).

Ces 23.000 m2 pourraient dès lors prendre place dans un des bâtiments existants (et assez récent) appartenant déjà à la SNCB. Par exemple, le complexe « Delta-Flots de Senne » (Flots de Senne construit en 1960 rénové en 2014 et Delta construit en 1996) contient une surface nette de 26.000 m2 et possède une localisation en bordure de voie ferrée qui se prête peu à d’autres usages que le bureau. Une autre configuration, qui permettrait de rencontrer les besoins en superficie serait de continuer à occuper l’immeuble « Atrium » (construit en 2000) dont la surface nette est de 38.468 m2. Dans cette option, la SNCB pourrait quand même vendre la partie à l’avenue Fonsny 49 (partie hôtel) et/ou configurer la répartition de ses bureaux de manière différente. Une autre option d’immeubles de bureaux relativement récents que la SNCB pourrait occuper comme deuxième site est celui des immeubles qu’elle possède à front de la rue Bara (construits en 1991).

Par ailleurs, pour donner toute la souplesse nécessaire à la répartition la plus adéquate des services de la SNCB sur les deux sites, il est possible d’envisager une augmentation de surface en profondeur du site Fonsny, en étendant l’une ou l’autre partie de bâtiment en façade arrière. Afin de préserver au mieux le patrimoine et minimiser le chantier sur le site, ce n’est pas l’option que nous privilégierions mais elle est néanmoins plus envisageable et acceptable qu’une extension en hauteur. Il y a donc un grand nombre de possibilités de reconfiguration et de rationalisation de l’implantation de la SNCB aux alentours de la gare du Midi sur deux sites.

Ces alternatives sur deux sites ont plusieurs avantages :

  • une rénovation plus douce et respectueuse des bâtiments historiques de l’avenue Fonsny qui deviendrait le bâtiment phare de la SNCB ;
  • moins de densité sur un seul site avec son corollaire de problèmes accrus de mobilité ;
  • le disparition de la surhausse et des nuisances qu’elle entraîne ;
    des chantiers moins longs, moins lourds et plus répartis ;
    globalement moins d’opérations de démolitions-reconstructions et, ce faisant, un impact environnemental moindre ;
  • ceci sans empêcher de porter une attention aux qualités environnementales et énergétiques des rénovations à prévoir et à la mise en place de toitures vertes ;
  • probablement un coût global moindre et, donc, la capacité pour la SNCB de préserver une plus grande part de ses propriétés foncières dans le cas d’une opération de collaboration financière revue ;
  • elles n’empêchent en rien le programme englobé sous le vocable de « gare habitante » de remise en lien de la gare du Midi avec le quartier environnant.

Conclusions

Nous demandons à ce que la Commission de concertation émette un avis négatif à la demande de permis et que celui-ci soit refusé pour les raisons développées ci-dessus, en particulier :

  • la justification inadéquate de la dérogation des hauteurs au RRU ;
  • les nombreuses incidences négatives de la surhausse et la densité du projet ;
  • la mauvaise prise en compte de l’ensemble des incidences par l’EIE (ombres…) ;
  • la possibilité pour la SNCB de rester implantée dans le quartier tout en réalisant une rationalisation significative de ses implantations au regards des nombreuses propriétés qu’elle y possède, dont le bâtiment voisin du projet à l’avenue Fonsny 49 ;
  • la possibilité de rénover le patrimoine, de minimiser les nuisance et d’avoir un impact environnemental moindre par une implantation plus « sobre » sur deux sites ;
  • ce faisant, la possibilité d’économiser des matériaux et de l’énergie et de minimiser l’impact et la durée des chantiers.

Nous appelons de nos vœux la révision d’un projet plus respectueux de l’environnement et de la qualité de vie du quartier qui rénoverait les bâtiments historiques et emblématiques existants sans les surhausser.